Pascal - Tous errent d’autant plus dangereusement qu’ils suivent chacun une vérité. ...
Tous errent d’autant plus
dangereusement qu’ils suivent chacun une vérité. Leur faute n’est pas de suivre
une fausseté mais de ne pas suivre une autre vérité.
Blaise Pascal – Pensées
Pour se diriger dans la
vie, pour prendre ses décisions, chacun a des guides, des préceptes, des
vérités. Tel, par exemple, prônera la tolérance, l’écoute et la gentillesse.
Tel autre revendiquera la dureté, la rigueur et la constance.
Mais pourtant, on sait
aussi qu’il faut adapter son jugement à la situation, et le même qui soutient
qu’on doit faire preuve d’une grande indulgence envers les hommes pour leurs
fautes, se montrera intransigeant envers ses propres enfants, il ne leur
pardonnera qu’après leur avoir fait ressentir tout le mal qu’il ont fait dans
telle bêtise. Ainsi dans la vie la plus courante, nous sommes bien souvent près
à abandonner nos certitudes et à agir sans en tenir compte.
Mais concernant celles des
vérités qui sont le mieux établi nous refusons parfois d’avance le dialogue, et
les conversations ne deviennent alors que de sèches batailles d’arguments
inutiles, puisque nous n’avons pas l’intention de nous laisser convaincre par
celui que nous appelons en secret « adversaire » car la vérité qu’il
porte nous parait faire obstacle à celle que nous suivons. Ainsi certains des
scientifiques refusent d’emblé tout débat concernant l’existence de Dieu ou le
bien-fondé de la recherche psychanalytique.
Mais la question ici n’est
plus de savoir si nos propres raisons son fiables, mais de ne pas rejeter d’avance
un autre discours sous prétexte qu’il heurte nos convictions. S’il humain de s’accrocher
à nos rêves comme à un radeau lorsque rien ne se présente pour nous sauver,
c’est un tord de refuser pas avance de regarder, d’examiner ce qui nous
apparaît pourtant, au regard de nos convictions actuels, comme très
vraisemblablement faux. Et comme un noyé apeuré refuse de lâcher sa bouée pour
saisir le bateau, nous nous contentons souvent d’une imparfaite
« vérité » par peur d’être un instant privé de certitude, par peur de
sombrer dans des eaux sombres sans toucher le fond ni être encore assuré que ce
bateau, qui vient à nous, ne vacillera pas sous le poids de notre corps.
Ainsi
l’art contemporain est encore décrié parce que selon les canons de beauté
que nous connaissons, cet art n’est pas « beau ». On se cache alors
derrière ce qu’on appelle à tord la subjectivité, et qui n’est que l’ignorance
du chemin à prendre pour découvrir la véritable beauté que contient parfois
certaines de ces œuvres, un chemin que seul l’œuvre pourrais nous apprendre si
nous acceptons d’abandonner un instant les pseudo-certitudes auxquelles nous
nous agrippons avec la bonne foi d’une enfants qui s’accroche à son nounours.
Cette autre vérité, ces
autres vérités, que nous refusons de suivre parce que nous voyons bien pourquoi
elles ont mauvaise réputation, il n’est pas seulement bête de ne pas la suivre
puisque est ce sont des vérités, mais dangereux et mal.
Car si ne pas percevoir une
vérité n’est pas une faute, la fuir sans la connaître en est une. Car en
faisant primer notre avis propre, en refusant de nous avancer un peu dans une
direction certes encore incertaine, mais potentiellement fructueuse, nous devenons
un frein au développement de l’homme. C’est là la différence entre
l’obscurantiste et le religieux curieux du monde : le premier s’enferme
dans sa vérité, tandis que l’autre, non content d’accepter de ne pas être
compris par tous, s’élève jusqu'à tenter de s’engager sur des voies dans
lesquels ce qu’il peut y avoir de faux dans sa religion risque de lui sauter au
visage comme une mauvaise conscience. C’est là aussi la différence entre certains
des savants épris de raisons, qui suivirent pascal dans sa recherche de vérité
dans la religions, au risque de prendre conscience de la faiblesse des fondements
de leur propre raison, et des sciences qu’il on bâtie sur elle, et d’autres
savants qui réfutent à l’aide d’une science inadéquate que la métaphysique soit
porteuse de vérité.